Mémoire au Comité permanent des finances de la Chambre des communes pour les consultations prébudgétaires en vue du budget fédéral de 2024

En 2022, des organisations de patients, des associations professionnelles et des entreprises du secteur des sciences de la vie qui constataient l’ampleur du problème auquel sont confrontées les personnes atteintes de cancer dans nos systèmes de soins du cancer se sont réunies pour former Agir contre le cancer maintenant. Cette alliance nationale lutte et sensibilise pour garantir aux Canadiens et Canadiennes un accès opportun, équitable et de qualité à des soins appropriés, souhaitant ultimement améliorer les chances de survie au Canada.

Les soins du cancer ont atteint un point critique en raison des perturbations généralisées du dépistage, du traitement et des interventions chirurgicales provoquées par la pandémie de COVID-19. Selon Statistique Canada, en 2020, le nombre de diagnostics de cancer a chuté de 12,3 % par rapport au taux annuel moyen enregistré au cours des cinq années précédentes,1ce qui est probablement dû à la difficulté d’accès aux soins primaires et au sous-dépistage. Cela signifie qu’un plus grand nombre de patients présentent des stades avancés de cancer, nécessitant des traitements agressifs et davantage d’interventions chirurgicales, ce qui a pour effet d’augmenter la pression et les coûts supportés par des systèmes de santé déjà surchargés.

La pandémie a également exacerbé la pénurie de dispensateurs de soins de santé. Selon une étude publiée en 2022, près de 6 millions de Canadiens n’ont pas de médecin de famille, dont le tiers d’entre eux en cherchent un depuis plus d’un an.2 Cela signifie que moins de personnes sont référées en temps opportun pour réaliser des tests de dépistage et des examens du cancer, menant à des diagnostics plus tardifs. Durant ce délai, de nombreux cancers progressent à un stade ultérieur, les rendant encore plus difficiles à traiter.

Nos systèmes de soins du cancer étaient déjà en difficulté dans les années qui ont précédé la pandémie, mais la situation est encore pire aujourd’hui. Nos stratégies doivent évoluer : le Canada doit s’attaquer d’urgence à la panoplie de problématiques qui affligent nos systèmes de santé dans tout le continuum de soins, des soins primaires aux soins spécialisés, en passant par les soins de soutien, les soins palliatifs et les soins de fin de vie. De plus, la qualité des soins reçus par les Canadiens et les Canadiennes et leur temps d’attente avant de les recevoir ne devraient pas dépendre de la région du pays où ils résident.

Nous demandons à votre gouvernement de mettre en œuvre les trois recommandations ci-dessous afin que les centaines de milliers de Canadiens et Canadiennes touchés par le cancer et leurs familles puissent accéder aux soins dont ils ont besoin, là où ils en ont besoin, et vivre en meilleure santé et plus longtemps que partout ailleurs dans le monde.

Recommandation

Nous vous invitons à travailler avec les provinces et les territoires, les dispensateurs de soins de santé dans le continuum des soins contre le cancer, les patients, les proches aidants et les groupes marginalisés, avec la collaboration du caucus multipartite fédéral sur le cancer, afin d’établir un ensemble de normes communes et pancanadiennes pour les soins du cancer. Cette initiative offrira un cadre de référence fondé sur les faits pour la prestation de soins auquel tous les Canadiens et Canadiennes pourront se référer.

Le Canada a déjà fait un pas dans la bonne direction en implantant le Cadre sur le diabète au Canada et la norme nationale pour les soins de longue durée, en plus de développer actuellement les normes nationales relatives aux services en matière de santé mentale et de consommation de substances psychoactive.

Le Canada a déjà fait un pas dans la bonne direction en implantant le Cadre sur le diabète au Canada et la norme nationale pour les soins de longue durée, en plus de développer actuellement les normes nationales relatives aux services en matière de santé mentale et de consommation de substances psychoactive.

Recommandation

En nous appuyant sur le travail effectué par la Société canadienne du cancer, le Partenariat canadien contre le cancer et le Comité consultatif d’experts de la Stratégie pancanadienne de données sur la santé, nous vous recommandons d’investir dans la création et la mise en œuvre d’une stratégie pancanadienne de données sur le cancer afin d’assurer la responsabilisation dans la prestation des soins, l’interopérabilité dans le continuum des soins liés au cancer et la production de rapports transparents sur les progrès réalisés d’une année à l’autre par rapport à des paramètres spécifiques liés au cancer. Ce travail devrait impliquer les dispensateurs de soins de santé dans le continuum des soins du cancer, les patients, les proches aidants et les groupes marginalisés afin de s’assurer que les paramètres inclus et mesurés mènent à des améliorations tangibles dans le système de soins du cancer.

Ce qui n’est pas mesuré ne peut être amélioré. Sans données, il est impossible de vérifier si les mesures implantées et les sommes investies engendrent l’impact souhaité. Des politiques fondées sur des preuves et des données visant à améliorer les systèmes de soins du cancer au Canada profiteront aux centaines de milliers de Canadiens et Canadiennes qui utilisent ces systèmes chaque jour.

Nous demandons à votre gouvernement d’investir dans une stratégie de données sur les soins du cancer afin d’améliorer la rapidité de la saisie et la disponibilité des données, d’établir des indicateurs de qualité des données, de garantir l’interopérabilité et l’intégration des données sur le cancer, de combler les lacunes en matière de données sur les déterminants sociaux de la santé et d’améliorer la collecte des résultats et de l’expérience rapportés par les patients. Il est également essentiel que votre gouvernement mesure chaque année les coûts reliés au cancer et qu’il travaille en étroite collaboration avec les provinces et les territoires pour favoriser la transition vers les dossiers médicaux personnels et améliorer le partage des données entre les médecins, les équipes de soins et les patients.

Recommandation

Nous recommandons de travailler avec les organisations nationales et les partenaires provinciaux et territoriaux pour résoudre les problèmes d’accès et d’inégalité au système de soins du cancer, tels que l’accès aux thérapies et aux thérapies innovantes basées sur le génome pour les soins du cancer, et de veiller à ce que la qualité des soins reçus par les Canadiens et les Canadiennes et leur temps d’attente avant de les recevoir ne dépendent pas de la région du pays où ils résident.

La science permet de réaliser des avancées rapides dans le traitement du cancer. Celles-ci sont fondamentales pour améliorer les résultats, la qualité de vie et la survie des Canadiens et des Canadiennes confrontés à des diagnostics de cancer, et plus particulièrement à des stades avancés. Dans ce contexte, nous demandons à votre gouvernement de veiller à ce que les mécanismes visant à garantir un accès rapide aux essais cliniques ou aux nouveaux traitements contre le cancer soient considérés comme une priorité.

Les populations rurales et isolées du Canada sont confrontées à divers obstacles dans l’accès aux soins préventifs et aux traitements, faisant notamment face à des temps de déplacement plus longs, des coûts plus élevés et moins de ressources de santé disponibles. Elles sont moins susceptibles d’accéder ou de participer à des programmes de dépistage du cancer, en plus d’être davantage propices à subir de longs délais d’attente pour consulter des spécialistes ou à devoir se déplacer en dehors de leur territoire pour avoir accès à des soins.

Les Canadiens et les Canadiennes jouent à la loterie chaque fois qu’ils doivent utiliser le système de santé. En fonction de la chance qu’ils ont, ceux-ci auront peut-être accès à un dépistage pour le cancer de la prostate, ou pas. En quelque sorte, ils jouent avec leurs chances de survie à un diagnostic de cancer. Pour remédier à cette inégalité, il faudra une action concertée des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, fondée sur l’expérience des dispensateurs de soins de santé dans le continuum des soins du cancer, des patients, des aides familiaux et des groupes marginalisés d’un peu partout au pays qui naviguent dans le système de soins du cancer.

Il faut à tout prix éviter de travailler encore plus en silo. Le gouvernement fédéral, en collaboration avec les administrations, peut s’attaquer à des priorités importantes pour améliorer les soins du cancer au Canada. Une attention particulière devrait-être portée à l’augmentation de la disponibilité des soins primaires pour tous les usagers et usagères, à l’amélioration de la collecte des données, au renforcement des ressources humaines en santé, au soutien des équipes prodiguant des soins holistiques et interdisciplinaires et à la garantie d’un accès équitable au dépistage et au traitement pour tous les Canadiens et les Canadiennes, quel que soit leur lieu de résidence.

Nous pourrons dire qu’il y a eu des progrès lorsque davantage de Canadiens et Canadiennes seront diagnostiqués avec un cancer à un stade précoce, que moins de Canadiens et Canadiennes seront diagnostiqués avec un cancer à un stade avancé, et que ceux qui sont aux prises avec un cancer ne se contenteront pas de survivre, mais aussi de s’épanouir. Lorsque nous atteindrons ce jalon, cela signifiera que notre système de soins du cancer répondra véritablement aux besoins des Canadiens et des Canadiennes qu’il dessert.